POURQUOI LIRE Terremer ?
- Le livre : ce sont en fait cinq romans et un recueil de nouvelles qui composent la série de Terremer, enrichie aux fils des ans.
- Le décor : le monde de Terremer avec ses nombreuses îles, ses mers, ses paysages différents et les habitants de chaque archipel.
- Le genre : c’est de la fantasy, avec ses sorciers et ses dragons, mais ce qui fait tout l’intérêt des livres de Le Guin, c’est l’écriture, et le soin apporté aux personnages.
- Le style : ça se lit très rapidement, même si les dialogues sont peu nombreux. L’écriture de Le Guin laisse beaucoup de place aux descriptions, qui sont très belles.
L’HISTOIRE
C’est l’histoire du monde de Terremer, et des dangers qu’il encoure. Le monde est vaste, constitué de plusieurs mers et de nombreuses îles. Sur chaque île ou presque vit un peuple, avec ses traditions, son artisanat, sa langue parfois. Dans ces trois premiers tomes du cycle, on suit le personnage de Ged, tout d’abord dans son apprentissage de la magie, puis dans ses aventures.
À partir de Tehanu, le livre 4 de la série, le point de vue change, assez radicalement. C’est le personnage de Tenar qu’on a suivi dans le tome 2 qu’on suit. Elle et la fille qu’elle adopte. Dès lors, le cycle change de teinte, de rythme et prend une nouvelle dimension, plus profonde, moins Young Adult que les livres précédents.
Le Sorcier de Terremer
Le sorcier de Terremer est le premier tome du cycle. On suit le jeune Ged, à qui on découvre des dons pour la magie. Il sera envoyé à l’école de Roke, pour parfaire son éducation. La magie, dans Terremer, est contenue dans le vrai nom des choses. Il devra les apprendre, mais surtout apprendre à utiliser sa magie en respectant les règles de l’équilibre.
Ce premier tome ressemble à beaucoup de livres de fantasy par son histoire (celle d’un adolescent qui a des pouvoirs magiques et ira dans une école pour les développer). C’est sans doute parce que le cycle de Terremer a inspiré nombre d’auteur·es après Ursula K. Le Guin.
Mais ce qui fait la différence dans l’œuvre de Le Guin, c’est le style. Les pouvoirs magiques sont contenus dans les mots. Alors les mots, dans Terremer sont très importants. La forme rejoint l’histoire. Et c’est une écriture magnifique que donne à lire Le Guin dans cette trilogie.
« When he found that the wild falcons stooped down to him from the wind when he summoned them by name, lighting with a thunder of wings on his wrist like the hunting-birds of a prince, then he hungered to know more such names and came to his aunt begging to learn the name of the sparrowhawk and the osprey and the eagle. To earn the words of power he did all the witch asked of him and learned of her all she taught, though not all of it was pleasant to do or know. There is a saying on Gont, Weak as woman’s magic, and there is another saying, Wicked as woman’s magic. »
Le sorcier de Terremer, Ursula K. Le Guin
Les tombeaux d’Atuan
Si c’est possible, le second tome du cycle de Terremer m’a plu encore plus que le premier. C’est sans doute dû à ses personnages, qui deviennent de plus en plus intéressants : torturés, perdus, pleins de questions, de secrets.
L’histoire commence a priori sans suivre la trame du premier tome. On suit un nouveau personnage, Ténar, une adolescente qui est devenue la Gardienne des tombeaux d’Atuan. Et ce personnage est sans doute mon préféré de toute la trilogie. Très intelligente, méfiante, acceptant le rôle qui lui est incombé, mais souhaitant le faire à sa manière, Ténar est un personnage féminin très intéressant. Fait assez rare en littérature de l’imaginaire pour être souligné.
Ce n’est qu’à la moitié du roman peut-être que Ged apparaît, et que l’histoire s’inscrit dans la trame du cycle.
« And Tenar listened to the sea, a few yards below the cave mouth, crashing and sucking and booming on the rocks, and the thunder of it down the beach eastwards for miles. Over and over and over it made the same sounds, yet never quite the same. It never rested. On all the shores of all the lands in all the world, it heaved itself in these unresting waves, and never ceased, and never was still. The desert, the mountains: they stood still. They did not cry out forever in a great, dull voice. The sea spoke forever, but its language was foreign to her. She did not understand. »
Les tombes d’Atuan, Ursula K. Le Guin
L’ultime rivage
L’ultime rivage devait être l’ultime roman de la trilogie initiale. Ce n’est que bien plus tard qu’Ursula K. Le Guin écrira une suite. On retrouve Ged, plus âgé, accompagné d’un jeune adolescent, prince de l’île d’Enlade. La magie semble disparaître de Terremer, pourront-ils ensemble arrêter ce qui crée ce bouleversement ?
Le personnage de Ged a vieilli, il est plus sage, et plus silencieux que jamais. Le jeune Arren est plein de questions. Ce duo a une dynamique très intéressante dans ce roman. J’ai beaucoup aimé leurs interactions, mais surtout les secrets qu’ils gardent l’un envers l’autre. Une très belle façon d’écrire sur l’impétuosité de la jeunesse, sur tout ce qui se passe dans la tête des personnages, et comment ça influe sur leurs actions.
Et puis on retrouve les dragons et la mer, le bateau de Ged, déjà présents dans le premier tome. Et c’est une très belle (première fin) de l’histoire de Terremer.
Tehanu
Treize ans après L’ultime rivage, Ursula K. Le Guin a publié Tehanu. Alors que le livre commence tout juste au moment où se termine l’action du roman précédent, il aura fallu de nombreuses années à l’autrice pour l’écrire. Elle avait tout d’abord cru que l’histoire était terminée. Puis, se rendant compte qu’elle avait encore beaucoup à dire sur le monde de Terremer, elle avait commencé une suite, mais elle n’arrivait pas à aller bien loin. La raison selon elle : elle n’était pas prête encore à écrire cette histoire du point de vue d’une femme.
Dans Tehanu, c’est Tenar qui est la plus présente. Tenar et les femmes desquelles elle s’est entourée : la chevrière, la vieille sorcière Tante Mousse et surtout la jeune Therru, qu’elle a recueilli. Arren, devenu roi, est un personnage secondaire, et Ged, privé de ses pouvoirs, se cache et se morfond. C’est Tenar et sa fille adoptive qui prenne les rênes de l’histoire.
C’est peut-être mon roman préféré de tout le cycle. La relation entre Tenar et Therru m’a beaucoup parlé. Celle de Tenar et Ged m’a beaucoup plu. Le retour des dragons sur le devant de la scène y joue peut-être également pour quelque chose.
Contes de Terremer
C’est le meilleur livre du cycle de Terremer ! C’est facile pour moi : j’adore les nouvelles. Et Ursula K. Le Guin est une excellente novelliste ! Mais ce que j’aime par dessous tout, c’est qu’on découvre de nouveau personnages, de nouvelles îles. On en apprend un peu plus sur l’histoire de Terremer, l’histoire des rois, l’histoire des mages, celle des dragons.
Dans les Contes de Terremer, le virage féminin/féministe de l’histoire est peut-être encore plus visible – irrémédiable. Avec l’histoire Le trouvier, qui raconte la création de Roke, comment les mages se sont approprié l’île et en ont chassé les femmes qui pratiquaient la magie. Et avec l’histoire de Libellule, qui est un de mes personnages préférés du cycle et qui nous prépare au dernier roman.
Le vent d’ailleurs
Souvent, je n’aime pas tellement les derniers tomes des cycles. Je les trouve trop faciles, prévisibles, ou bâclés, ou moins bien écrits. Le vent d’ailleurs fait exception. Ursula K. Le Guin arrive à nous surprendre avec cette dernière histoire.
Elle y lie d’anciennes légendes avec ce que nous apprennent de nouveaux personnages. Elle nous fait voyager sur de nouvelles îles et retrouver nos lieux préférés : la forêt de Roke et le monde des morts. En refermant le livre, apaisé·e, en retournant sur Gont après de nombreux périples, on sent que l’histoire est complète, on peut enfin se reposer. Et si on décide de revenir à Terremer, ce ne sera plus pour s’y battre, mais pour y revivre de très beaux souvenirs.
CE QUE J’EN AI PENSÉ
J’ai tout simplement adoré cette trilogie ! Et je n’ai qu’une hâte, trouver les autres livres (entre les nouvelles écrites avant, celles écrites après, les contes de Terremer et les romans suivants), je veux tout lire !
Ça faisait longtemps que je n’avais pas lu de fantasy (après en avoir beaucoup lu, plus jeune), parce que j’avais peur d’être trop vieux pour ça maintenant. De ne pas pouvoir rentrer dedans avec le même bonheur qu’avant. C’était sans compter sur l’écriture magnifique de Le Guin, avec des phrases poétiques, qui coulent, nous bercent, nous emmènent toujours plus loin.
Contrairement à beaucoup de livres de fantasy (notamment écrits pour les plus jeunes), les personnages de Le Guin ne sont jamais agaçants. Ils ont des ambitions, des problèmes, ils se posent des questions. Ils font réfléchir le lecteur ou la lectrice. C’est un véritable plaisir de voir des personnages aussi bien écrits en littérature de l’imaginaire.
Et ça fait plaisir de voir qu’ils ont grandi, vieilli, mûri entre les trois premiers livres du cycle et la suite. Les trois derniers livres sont encore meilleurs que les premiers à mon avis. Plus profonds, plus intelligents. Dans l’édition intégrale du livre de poche, Ursula K. Le Guin se défend des critiques qui lui ont été faites à la sortie de Tehanu, et c’est un plaisir de lire ses intentions et ce qu’elle pense, en tant qu’autrice, de ses propres livres.
Où trouver Les livres de Terremer ?
Vous trouverez en français une édition avec l’intégrale du cycle de Terremer chez le Livre de poche. Elle contient non seulement tous les livres dans l’ordre, plus des préfaces et des analyses de l’autrice, ainsi que des nouvelles inédites en français. Vous trouverez sans problème ce livre chez tout bon libraire.
QUE LIRE APRÈS ?
Si vous ne connaissez pas l’œuvre d’Ursula K. Le Guin, je vous conseille également de lire La main gauche de la nuit, un récit de science-fiction qui m’a beaucoup plu.
J’ai aussi très envie de lire son roman Les dépossédés, qui fait partie du même cycle de l’Ekumen.
Je ne me suis pas arrêté là avec Le Guin, j’ai également lu :
- Danser au bord du monde
- Le nom du monde est forêt
- La vallée de l’éternel retour
Domi 17 / 03 / 2022
Lus, et pas tous les tomes, il y a quelque temps (Tehanu est le dernier découvert), cet univers m’a complètement scotché.
A vrai dire, j’avais découvert Terremer par le film qui en a été tiré. Je vous conseille de faire l’impasse sur celui-ci : il est nul et plus encore.
Donc j’avais les livres (les 3 premiers, l’histoire de Ged) qui m’attendaient mais j’avais vraiment pas envie.
Et puis un jour par lassitude, j’ouvre le bouquin et ce fut la révélation. Impossible d’en sortir. Un univers addictif, tout bien pensé, ensorceleur. J’étais conquis et totalement fan d’Ursula mais triste que l’histoire se termine.
Donc je passe à autre chose. Et quelle ne fut pas ma surprise chez Richard mon bouquiniste de tomber sur Tehanu. Je me dépêche de le lire et le sort jeté des années plus tôt se réactive. Comme un conditionnement soviétique, me revoilà plongé dans cet univers.
Fin du livre, pincement au coeur, pas envie de sortir de cet univers.
Et quelle joie de découvrir ici qu’il y a encore des contes et une autre histoire issues de cette mythologie.
Je vais me jeter sur ce bouquin, revendre mes petits morceaux de cette histoire, en faire profiter la terre entière pour faire advenir un monde meilleur !
Permets Florian que je te tutoie : merci, merci, merci.
Florian 21 / 03 / 2022 — Le Dévorateur
Bien sûr, tutoyons-nous !
Je suis bien content de lire ton commentaire. Depuis quelques années, Ursula K. Le Guin m’a apporté tellement de bonheurs de lecture et je suis content de voir que je ne suis pas le seul à qui ça arrive. Je te conseille alors de regarder parmi tous ses autres livres (il y en a tant !). Ils sont tous différents (et sans doute assez différents de Terremer), mais il y a quelque chose à chaque fois qui fait mouche avec moi.
Domi 05 / 04 / 2022
Oui j’avais lu le monde de Rocannon ou un titre approchant il y a quelque temps, j’avais beaucoup aimé. Et là, pouf, je me rends compte que c’est le premier livre du cycle de Hain, dont la main gauche de la nuit est le quatrième. J’avais eu plus de mal à le lire celui-là.
Le Dit d’Aka, suivi de Le nom du monde est forêt (Le Livre de Hain, Tome 6 et 7) aux livres de poche m’intéresse. Oui je lis dans le désordre.
Quelle oeuvre considérable ! J’en salive d’avance. J’aurai pas assez de place dans ma bibliothèque pour tous les rentrer.